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Ralentisseurs illégaux : l’État veut légaliser l’illégalité, au mépris des vies

Alors que la France est confrontée à une stagnation préoccupante de ses indicateurs de sécurité routière, le gouvernement semble avoir pris une orientation pour le moins déroutante. Plutôt que de renforcer les normes existantes et de corriger les erreurs du passé, l’exécutif envisage de régulariser a posteriori des ralentisseurs non conformes, pourtant reconnus comme dangereux et illégaux. C’est ce que révèle un courrier officiel daté de juillet 2025, dont le contenu a été dévoilé par l’association Pour Une Mobilité Sereine et Durable (PUMSD) et relayé par la Ligue de Défense des Conducteurs (LDC).

Ce document, qui a fait l’objet d’un précédent article, indique que l’État ne prévoit pas de démanteler les innombrables dispositifs installés en violation du décret n°94-447 du 27 mai 1994, qui encadre strictement les conditions d’implantation des ralentisseurs sur le réseau routier français. Au contraire, il envisage de modifier la réglementation pour rendre légaux tous les ralentisseurs illégaux, autrement dit non conformes. Pourquoi ? Parce que cela coûterait très cher de détruire tous les ralentisseurs illégaux de France. De plus, tel un « petit arrangement entre amis », le ministère en charge des Transports souhaiterait couvrir le CEREMA, l’agence publique à l’origine d’un guide qui n’a jamais eu de valeur légale et sur lequel la très grande majorité des maires s’est appuyée depuis toujours pour installer les ralentisseurs devenus illégaux. Ci-dessous, un double ralentisseur illégal avec, pour chaque sens de circulation, une « double bosse ».

Cette démarche de vouloir à tout prix légaliser les ralentisseurs illégaux, ou non conformes, est anti-constitutionnelle. Pour Antonin Morelle, président de PUMSD, elle constitue une menace directe pour l’État de droit :

« Modifier aujourd’hui la réglementation dans le seul but de régulariser artificiellement des dispositifs non conformes constitue une atteinte grave à la sécurité juridique. »

Insistons bien, l’État français souhaiterait ainsi contourner les dernières jurisprudences administratives en matière de ralentisseurs jugés illégaux. Le ministère en charge des Transports souhaiterait également, et c’est le plus étonnant, s’opposer à la décision prise par le Conseil d’État. Ce dernier, la plus haute juridiction administrative française, a validé implicitement, en mars dernier, suite à une jurisprudence émise par la Cour administrative d’appel de Marseille que le décret n°94-447 doit être respecté en France. Le décret en question représente donc désormais la loi à respecter strictement pour implanter un ralentisseur. Puis, et c’est loin d’être un détail, cette fois, la Cour administrative d’appel de Nancy a émis une nouvelle jurisprudence de principe en s’alignant sur l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille et de l’arrêt du Conseil d’État, indiquant que tout type de ralentisseurs devait être implanté conformément au décret n°94-447.

La LDC dénonce une décision prise en toute connaissance de cause. Les principales conditions d’implantation d’un ralentisseur dans le décret 94-447 du 27 mai 1994 sont les suivantes :

  • Une hauteur maximale de 10 cm pour les ralentisseurs de type dos d’âne
  • Une pente inférieure à 10 %
  • Une interdiction d’implantation sur les voies empruntées par plus de 3 000 véhicules/jour
  • Une interdiction sur les axes desservis par les transports publics ou les services de secours

Or, selon les données disponibles, près de 90 % des ralentisseurs en France ne respectent pas ces critères. Le Conseil d’État et plusieurs tribunaux administratifs ont, encore une fois, déjà reconnu leur non-conformité dans des décisions récentes évoquées plus haut, notamment à Toulon, Grenoble, Marseille, Douai et Nantes, où des collectivités ont été condamnées pour avoir installé des ralentisseurs illégaux.

Depuis 2015, plusieurs ralentisseurs illégaux, ou non conformes, ont été directement impliqués dans des accidents mortels ou ayant entraîné des handicaps lourds chez des usagers de la route. Les victimes incluent des piétons, des cyclistes, des motards et des automobilistes. Ces installations, souvent mal signalées ou excessivement hautes, provoquent des pertes de contrôle, des chutes, des collisions et des dommages mécaniques graves :

  • 2015 : décès d’un piéton de 91 ans dans le Var
  • 2016 : blessure grave d’un motard à Toulon
  • 2021 à 2025 : multiples cas de traumatismes sévères, handicaps permanents ou décès dans le Jura, la Moselle, Paris, la Seine-Saint-Denis, les Bouches-du-Rhône, la Savoie, les Alpes-Maritimes, l’Ain, la Seine-et-Marne et l’Essonne

Alors que les derniers chiffres publiés par la Sécurité routière sont dramatiquement élevés avec 679 morts sur les routes françaises en juillet et août 2025, si l’État va jusqu’au bout de sa démarche en légalisant les ralentisseurs illégaux, il devra répondre de la mise en péril délibérée des citoyens français. C’est aussi simple que cela. Rappelons aussi que les routes françaises se dégradent chaque jour un peu plus, sans aucune réaction de nos élus.

Mais les impacts des ralentisseurs illégaux ne s’arrêtent pas là. Selon les études citées par PUMSD :

  • Les ralentisseurs illégaux entraînent une surconsommation de carburant de 25 %
  • Ils augmentent les émissions de CO₂ et de gaz à effet de serre de 27 %
  • Ils génèrent une augmentation comprise entre 300 % et 1 000 % des émissions de particules fines, issues des freins, des pneus et des gaz d’échappement
  • Ils provoquent 8 fois plus de nuisances sonores et de vibrations, affectant directement les riverains
  • Ils causent une dépréciation immobilière de 20 à 25 % pour les habitations situées à proximité
  • Ils ralentissent considérablement les services de secours, augmentant le risque de « perte de chance » en cas d’urgence médicale comme un AVC ou un infarctus

Malgré les alertes répétées des associations, des experts et des juridictions, l’État semble vouloir entériner une situation illégale au lieu de la corriger. Cette posture soulève des questions fondamentales sur la responsabilité politique, la protection des citoyens et le respect des normes. La LDC déclare ainsi :

« Il s’agit d’une faute politique, une incompétence notoire mais aussi une possible non-assistance à usagers en danger. »

Enfin, vous l’aurez sûrement remarqué au volant de votre voiture, chaque jour en France, des ralentisseurs illégaux continuent à être installés. C’est un véritable scandale et, encore une fois, cela met des vies en danger.

La rédaction

Photos : LesVoitures.com

Publié par
Frédéric Martin

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