La France et l’Espagne réaffirment leur soutien à l’interdiction de la vente de voitures neuves à moteur thermique en 2035, tandis que l’Allemagne et une partie de l’industrie automobile multiplient les pressions pour obtenir un assouplissement. La Commission européenne a confirmé qu’elle avancerait l’examen de la «  clause de revoyure  », initialement prévu en 2026, afin d’évaluer dès fin 2025 l’impact de cette mesure emblématique du Pacte vert.

La décision d’interdire, à partir du 1er janvier 2035, la commercialisation de voitures et utilitaires légers neufs équipés de moteurs thermiques, à essence, hybrides (HEV et PHEV), diesel ou gaz naturel, constitue l’un des piliers du Pacte vert européen. Cette orientation, adoptée en 2022, vise une réduction de 100 % des émissions de CO₂ à l’échappement pour les véhicules particuliers. Les voitures électriques neuves pourraient alors être les seules à être commercialisées au sein de l’UE. Cependant, la situation de crise que traverse actuellement la filière automobile européenne, principalement à cause de la concurrence chinoise et des faibles volumes de ventes de voitures électriques, remet en cause la date fatidique de 2035. L’Allemagne est donc contre, mais la France et l’Espagne ne partagent pas cette position.

2035 voitures électriques

Alors que Berlin plaide désormais pour un report ou une adaptation de cette échéance, Paris et Madrid ont réaffirmé leur opposition à tout recul. Les deux capitales estiment que céder aux pressions reviendrait à fragiliser la crédibilité climatique de l’Union et à ralentir la transition énergétique et le développement des voitures électriques.

Le chancelier Friedrich Merz a déclaré début octobre vouloir «  tout faire  » pour empêcher l’interdiction en l’état. L’Allemagne met en avant la dépendance de ses champions nationaux, Volkswagen, BMW et Mercedes-Benz, à leurs gammes thermiques, encore largement majoritaires dans leurs ventes mondiales.

Les industriels réclament l’introduction de flexibilités, notamment la reconnaissance des carburants synthétiques (e-fuels). Porsche, par exemple, investit massivement dans cette technologie pour prolonger la vie de modèles emblématiques comme la 911 équipée de son moteur flat-six.

La France, qui mise sur l’électrification accélérée de ses marques nationales (Renault, Peugeot, Citroën, DS Automobiles), insiste sur le fait que l’échéance de 2035 est atteignable. L’Espagne, où sont implantées des usines clés de Seat et de Renault Valladolid, soutient également le calendrier, estimant que la visibilité réglementaire est indispensable pour planifier les investissements industriels et protéger l’emploi.

Le règlement européen prévoyait une réévaluation en 2026 afin de mesurer les progrès réalisés et d’ajuster si nécessaire la trajectoire. Sous la pression des États et des constructeurs automobiles, la Commission européenne, dirigée par Ursula von der Leyen, a annoncé que cette clause de revoyure serait examinée dès la fin de 2025. Cet examen anticipé pourrait ouvrir la voie à des ajustements, sans pour autant remettre en cause l’objectif final. Les discussions porteront notamment sur la capacité de production de batteries en Europe, le déploiement des bornes de recharge rapide (objectif : 1 million d’unités d’ici 2030), le coût des voitures électriques, encore supérieur de 20 à 30 % à celui des modèles thermiques et la place éventuelle des technologies alternatives comme l’hydrogène ou les e-fuels. D’autres pistes seraient à l’étude comme les prolongateurs d’autonomie qui pourraient être autorisés sur les voitures électriques à partir de 2035, comme la vente des PHEV.

Malgré les débats, plusieurs constructeurs automobiles ont pris de l’avance. Renault mise sur sa gamme E-Tech avec notamment la Mégane E-Tech electric et la Renault 5 E-Tech electric. Toutefois, face à des ventes décevantes, le Renault envisagerait de réintroduire des motorisations thermiques ou hybrides sur la Mégane et le Scénic, initialement conçus comme 100 % électriques. Du côté de Volkswagen, la stratégie évolue : le groupe poursuit son programme électrique mais a décidé d’abandonner progressivement la dénomination “ID.” au profit d’un retour à des noms historiques dès 2026. Chez Mercedes-Benz, la stratégie est ajustée : la marque à l’étoile affirme vouloir être prête à vendre uniquement des voitures électriques «  là où les conditions de marché le permettront  » à partir de 2030.

Enfin, la bataille autour de l’interdiction des moteurs thermiques en 2035 illustre la tension entre impératifs climatiques et réalités industrielles, ces dernières étant liées aux voitures électriques. Si la clause de revoyure offre une porte de sortie à ceux qui souhaitent un assouplissement, la France et l’Espagne campent sur une ligne dure, convaincues que l’Europe doit rester leader dans la course mondiale à l’électrification.

La rédaction

Photos : LesVoitures.com