Dans quelques heures, l’avenue des Champs-Élysées sera investie par l’Armée française dans le cadre du traditionnel défilé de la Fête nationale du 14 juillet. Près de Nevers à Garchizy, en région Bourgogne-Franche-Comté, la société Arquus, spécialisée dans la conception et la fabrication de véhicules militaires, vient d’inaugurer un site que l’on peut qualifier d’historique. En effet, ce dernier regroupe, autour du nouveau et futuriste Arquus Scarabée, près de 80 engins militaires de toutes générations. Grâce à notre reportage exceptionnel, nous vous proposons de découvrir ce futur musée baptisé “Patrimoine Arquus”.
Le 17 juin dernier, à l’occasion de l’inauguration du “Patrimoine Arquus”, nous avons remonté le temps pour aller à la rencontre des génies qui ont consacré leurs vies à concevoir des véhicules et autres engins dédiés aux missions de l’Armée française : Paul Legueu, Louis Renault, Panhard & Levassor, Louis Delagarde et Marius Berliet. Lors du défilé de la Fête nationale du 14 juillet 2021, ces grands noms seront dans toutes les têtes de celles et ceux à qui nous dédicaçons ce sujet : les femmes et les hommes de l’Armée française. A Garchizy, Arquus a également présenté sa toute dernière innovation, le Scarabée à motorisation hybride. Appartenant au groupe Volvo, Arquus est née en 2018 suite au regroupement avec la filiale Renault Trucks Defense à laquelle appartenait déjà ACMAT et Panhard Defense.
Débutons notre visite du “Patrimoine Arquus” par le CBA Berliet, le camion de transport de matériels connu pour avoir ravitaillé l’Armée française lors de l’épisode de Verdun de 1916. Sur l’ensemble de la Première Guerre mondiale, ce ne sont pas moins de 15 000 CBA Berliet qui ont servi, à leur manière, dans les rangs de nos forces armées. 14-18, c’est aussi l’épisode des taxis de la Marne.
Motorisé par un 4-cylindres essence d’une puissance de 22 chevaux, le CBA Berliet était capable de transporter jusqu’à 4 tonnes de charge. Sur le site du “Patrimoine Arquus”, c’est une version bâchée en parfait état qui a été exposée le 17 juin 2021. On doit sa restauration à la Fondation Automobile Marius Berliet. Précisons que le CBA Berliet a été décliné en camion-citerne, DCA ou, encore, en ambulance.
Au centre de la “Place d’armes” du site créé par Arquus, c’est celui qui est considéré comme le premier char d’assaut de l’ère moderne qui est fièrement exposé : le Renault FT qui est apparu à la fin des années 1910 sous la forme d’un prototype. Il est le fruit des travaux conjoints réalisés par Renault, SOMUA, Berliet et Delaunay-Belleville. Fabriqué à 3 728 exemplaires et ayant été utilisé par de nombreuses armées étrangères, ce char léger a marqué de son efficacité la Première guerre Mondiale. Il sera ensuite engagé durant la Seconde guerre Mondiale du côté de l’Armée française.
A l’époque, la conception avant-gardiste du Renault FT en a donc fait le char le plus efficace principalement, car il a été le premier char d’assaut de l’histoire à être équipé d’une tourelle rotative à 360°, son moteur monté à l’arrière représentant une autre caractéristique innovante.
D’une fierté bleu-blanc-rouge à une autre, le célèbre SOMUA S35 montre son blindage indestructible juste à côté du Renault FT. Ce char a marqué la Seconde guerre Mondiale a plus d’un titre. Sa puissance extraordinaire de 190 ch issus d’un 8-cylindres SOMUA, son blindage incliné en acier moulé de 40 mm d’épaisseur, sa tourelle de 47 mm semi-autonome, ont notamment permis à l’Armée française de surpasser à tous les niveaux les Panzer I, II et III. Entre le Renault FT et le SOMUA S35, c’est un B1 bis (12-cylindres Renault de 307 ch) répondant à la catégorie des chars lourds qui est stationné.
Beaucoup plus petite, la chenillette tout-terrain Renault UE apparaît comme “minuscule”. Cependant, c’est bien son gabarit réduit qui a permis à l’Armée française de transporter du matériel léger, des munitions, des vivres ou de tracter un canon anti-char lors de la guerre 39-45.
Parmi les autres engins militaires présents le 17 juin dernier sur la “Place d’armes” du Conservatoire du véhicule militaire Arquus, le Panhard AML 60 a attiré notre attention avec son “regard méchant “. Ce véhicule de reconnaissance léger a été lancé à la fin des années 50. Il a été employé par l’armée de Terre et la Gendarmerie nationale entre 1960 et 1997.
Plus loin, un Saviem VAB Prototype SC des années 70 (VAB : Véhicule de l’Avant Blindé) semble être tout juste sorti de l’eau. Pas moins de 47 déclinaisons de ce véhicule amphibie seront conçues, ce qui en fera le transporteur de troupes le plus répandu en France (armée de Terre, armée de l’Air, Gendarmerie nationale, etc..). Le 14 juillet sur les Champs-Elysées, de nombreux VAB à 4, 6 ou 8 roues rouleront sur les pavés à l’occasion de la Fête nationale.
On en vient au Renault X8A Prototype, un VAB expérimental au châssis allongé qui a servi, dans les années 90,à la conception du futur VBCI (Véhicule Blindé de Combat d’Infanterie) de 2003.
Avant de faire le tour des autres halls du “Patrimoine Arquus” pour y découvrir d’autres engins militaires dont certains participeront, avec l’Armée française, au défilé de la Fête nationale du 14 juillet, le temps est venu de nous concentrer sur l’Arquus Scarabée.
D’une longueur de 5,25 m, d’une largeur de 2,1 m pour une hauteur de 2 m, l’Arquus Scarabée peut accueillir un équipage composé, au maximum, de 4 personnes. Ces dernières seront protégées par un blindage qui prend forme grâce une carrosserie au style plutôt très moderne.
Ce tout-terrain sera principalement “dans son jardin” dans les contrées éloignées du Moyen-Orient, Arquus pouvant le vendre à n’importe quel pays sachant que le Scarabée est disponible en plusieurs configurations avec la possibilité de l’équiper, entre autres, d’une tourelle TTOP Hornet. Le Scarabée pourrait donc également être acquis par l’Armée française dans les prochaines années. A ce titre, il a été développé en réponse au programme VBAE (Véhicule Blindé d’Aide à l’Engagement).
En termes de motorisation, le Scarabée, d’un poids de quelques 8 tonnes, est équipé d’un moteur diesel de 300 chevaux d’origine Maserati qui est associé à un système électrique de 70 kW soit près de 100 chevaux. Quant à sa batterie, elle affiche une petite capacité de 12 kWh pour une autonomie en tout électrique de quelques dizaines de kilomètres. Les troupes qui seraient engagées dans différentes OPEX pourraient donc remplir des missions d’infiltration et d’attaque sans se faire repérer grâce au Scarabée qui n’émet aucun bruit de moteur une fois le mode 100% électrique enclenché.
Aux côtés du Scarabée, c’est une autre nouveauté Arquus qui se montre à savoir, le camion Armis dans sa configuration à 6 roues. Il devrait être fourni à l’Armée française dans le cadre du transport de troupes, de matériels, le nom “Armis” correspondant précisément au nom de la nouvelle gamme de camions Arquus. Selon les modèles, ils peuvent être exploités en tant qu’ateliers mobiles de dépannage ou, encore, transporter des chars, etc…
Un peu plus loin dans le Hall Panhard, l’unique exemplaire du CRAB (Combat Reconnaissance Armoured Buggy) de 2012 est presque “caché”. Pourtant, c’est bien le design du CRAB qui a inspiré le style anguleux du Scarabée. Restons dans le Hall Panhard pour approcher un autre engin particulièrement intéressant et très historique, l’EBR FL-II.
Sur le plan de l’histoire de France, c’est un Panhard EBR FL-II qui a transporté le corps du Général de Gaulle de la Boisserie à l’église de Colombey-les-Deux-Eglises. Concernant l’aspect technologique du Panhard EBR FL-II , il est d’abord représenté par son canon F2 de 90 mm en réponse à la concurrence naissante des chars de combat soviétiques, l’ensemble des versions du blindé EBR ayant servi dans les rangs de l’Armée française entre 1951 et 1984.
Les autres particularités révolutionnaires, pour l’époque, de l’EBR FL-II sont représentées par sa structure symétrique à 2 postes de conduite opposés et ses 8 roues dont 4 sont montées d’énormes pneus increvables. Ce n’est pas tout, car comme vous l’avez sûrement remarqué, 4 autres roues en fer font de l’EBR FL-II un engin tout-terrain hors normes. Sur route, les roues métalliques sont levées grâce à un dispositif oléopneumatique, ceci pour gagner en vitesse (jusqu’à 100 km/h). Quand le moment est venu, par exemple, d’affronter une colline ou autre obstacle rocailleux, ces mêmes 4 roues sont descendues. En termes de motorisation, le Panhard EBR FL-II d’un poids de plus de 13 tonnes est mu par le fantastique 12H 6000 S : un 12-cylindres 6.0 l à plat de 200 chevaux.
Venons-en à une présentation plus générale des autres halls du Conservatoire Arquus du véhicule militaire. Pour commencer, celui dédié à Paul Legueu renferme les fameux ACMAT TPK (Véhicule de Commandement et de Transmission) qui sont connus en tant que “Command Car”. Lors de son investiture, le 14 mai 2017, c’est à bord de ce type de véhicule qu’Emmanuel Macron a remonté les Champs-Elysées. Le 14 juillet 2021 pour la Fête nationale, des ACMAT TPK seront ainsi visibles des passants, touristes et téléspectateurs qui suivront le défilé.
En sortant du Hall Paul Legueu, on tombe nez-à-nez sur un autre ACMAT TPK mais, cette fois, de compétition, le 420 SMT qui a participé au Rallye Paris-Dakar 1981.
Dans les autres halls, ce sont des blindés toujours en service qui sont présentés comme, par exemple, le Berliet VXB 170. Modernisé au fil du temps, ce VBMO (Véhicule Blindé du Maintien de l’Ordre) a récemment été déployé dans Paris lors du conflit social des “Gilets Jaunes”.
Toujours en milieu urbain, c’est l’Arquus Sherpa Light produit à ce jour à plus de 1 000 exemplaires qui est vendu un peu partout dans le monde, notamment au Maroc. Le GIGN en possède aussi mais en version “Echelle d’assaut”, ceci dans le cadre de la lutte antiterroriste. Le 14 juillet, lors du défilé de la Fête nationale, l’Arquus Sherpa Light devrait rouler sur la plus belle avenue du monde.
D’autres engins du même type ainsi que des 4×4 Panhard PVP (Petit Véhicule Protégé) semblent prêts à partir en mission. L’un d’entre eux, le Renault VAB Mark III fait partie des dernières nouveautés Arquus. A l’identique du domaine de l’automobile grand public, il a bénéficié des évolutions apportées depuis 40 ans sur d’autres VAB pour atteindre aujourd’hui un niveau de performance et d’efficacité qui en font un engin exporté partout dans le monde. Il est capable de grimper des pentes de 60% tout en pouvant être équipé d’une option “amphibie”. Sur route, il peut rouler à 100 km/h grâce aux différents moteurs qui peuvent l’équiper jusqu’à une puissance de 370 chevaux.
Concluons notre reportage exceptionnel avec des informations qui devraient vous attirer à Garchizy dans les prochaines semaines ! A l’occasion des 38èmes journées européennes du patrimoine (18 et 19 septembre 202), le “Patrimoine Arquus” ouvrira ses portes au public. Plus tard, à l’horizon 2022, 2023, le site sera ouvert en tant que musée. Sans nul doute, le “Patrimoine Arquus” deviendra alors une attraction historique pour petits et grands. D’ici là, c’est le défilé de la Fête nationale du 14 juillet 2021 qui offrira la possibilité d’observer le passé, le présent et le futur de l’Armée française. Attention teaser… Dans quelques mois nous vous proposerons un focus sur l’Arquus Scarabée !
Nous tenons à remercier l’entreprise Arquus, particulièrement Monsieur Marin Tollet (Press Manager) pour son accueil. Retrouvez, ci-dessous au terme de cet article, d’autres photos des engins militaires du “Patrimoine Arquus” dont l’insolite tracteur militaire Fordson type F 4×2 !
Texte : Frédéric Lagadec
Photos : LesVoitures.com (Alexandre Besançon)
Vidéo : LesVoitures.com (Thomas de Chessé)