L’époque où l’on achetait une voiture électrique sans se soucier de son avenir environnemental touche clairement à sa fin. À partir du 1er janvier 2026, toute nouvelle immatriculation d’un véhicule électrique, hybride ou hybride rechargeable en Belgique sera assortie d’une contribution environnementale obligatoire, gérée par Febelauto, l’organisme officiel chargé de la fin de vie des véhicules et des batteries.
Cette contribution liée au recyclage des batteries, inscrite noir sur blanc sur la facture, ne relève pas d’un caprice administratif : elle répond à une réalité industrielle et écologique devenue impossible à ignorer. Le volume de batteries usagées explose, et leur traitement exige des infrastructures lourdes, coûteuses et hautement spécialisées. Les chiffres parlent d’eux‑mêmes. En 2021, la Belgique ne collectait qu’un peu plus de 31 tonnes de batteries provenant des voitures électriques et autres véhicules électrifiés. Fin 2025, ce volume atteint plus de 412 tonnes, soit une hausse vertigineuse de 1 200 %.

Cette croissance n’a rien d’un hasard. Au premier semestre 2025, plus d’une immatriculation neuve sur deux en Belgique concerne un véhicule électrifié, dopé par une fiscalité très favorable aux entreprises. Le marché de l’occasion suit la même trajectoire, prolongeant la durée de vie des véhicules… et repoussant d’autant l’échéance du traitement de leurs batteries. C’est dans ce contexte que Catherine Lenaerts, directrice de Febelauto, parle sans détour de batteries usagées comme d’une « problématique de demain ». Une formule qui résume parfaitement l’enjeu : ce qui est aujourd’hui un flux gérable deviendra, demain, un défi industriel majeur. Contrairement à une simple batterie au plomb de 12 volts, recyclée depuis des décennies, un pack lithium‑ion de 300 à 400 kg est un assemblage complexe, potentiellement dangereux et rempli de matériaux stratégiques.
On y trouve du cobalt, du nickel, du cuivre, mais aussi des composants susceptibles de provoquer incendies, fuites chimiques ou une pollution des sols s’ils sont mal manipulés. Impossible de laisser ces éléments finir dans des casses non équipées ou dans des filières informelles. La contribution instaurée en 2026 sert donc à garantir que, dans 10, 15 ou 20 ans, lorsque les batteries des voitures électriques arriveront en fin de vie, les infrastructures et les financements seront en place pour les traiter correctement. Selon le barème officiel publié par Febelauto, le montant dépend du poids et de la technologie de la batterie. Pour une batterie de 100 à 350 kg, typique des compactes et berlines électriques actuelles, la contribution sera comprise entre 25 et 50 €. Pour les batteries de plus de 350 kg, fréquentes sur les grands SUV, la facture pourra atteindre 100 €.
Un point technique mérite d’être souligné : les batteries LFP (Lithium-Fer-Phosphate), pourtant réputées moins coûteuses à produire, peuvent être plus taxées dans certaines catégories que les batteries NMC (Nickel-Manganèse-Cobalt). La raison est simple : la valeur résiduelle des matériaux. Le cobalt, présent dans les NMC, se revend beaucoup mieux que le fer des LFP. Le recyclage des batteries LFP est donc moins rentable, ce qui justifie une contribution plus élevée pour les acheteurs d’une voiture électrique ou électrifiée. L’argent collecté ne sert pas uniquement à financer des broyeurs. Avant toute destruction, les batteries sont testées. Beaucoup, bien qu’insuffisamment performantes pour propulser une voiture à 130 km/h, restent parfaitement capables de stocker de l’énergie. Les batteries des voitures électriques peuvent alors être réaffectées à des systèmes de stockage stationnaire pour des bâtiments, des entreprises ou des installations photovoltaïques. Cette seconde vie peut durer jusqu’à dix ans et permet d’éviter jusqu’à 90 % des émissions de CO₂ par rapport à la fabrication d’une batterie neuve dédiée au même usage.
La Belgique n’est pas un cas isolé. En Europe, plusieurs pays cherchent à adapter leur fiscalité automobile à l’électrification massive du parc. Le Royaume‑Uni, par exemple, étudie activement l’instauration d’une taxe au kilomètre pour compenser la baisse des recettes issues des carburants fossiles. L’idée est simple : si les véhicules électriques ne paient plus de taxes sur l’essence ou le diesel, il faut trouver un autre moyen de financer les infrastructures routières. Une taxation basée sur les kilomètres réellement parcourus est l’une des pistes les plus sérieusement envisagées.
Revenons sur la contribution belge qui permettra d’assurer correctement le recyclage des batteries des voitures électriques, car elle s’inscrit dans cette même logique : faire évoluer la fiscalité pour accompagner la transition énergétique, tout en assurant la pérennité des services publics et des filières industrielles. Cette nouvelle ligne sur la facture fera sans doute grincer des dents. Les prix des véhicules électrifiés sont déjà élevés, et chaque euro compte. Mais cette contribution n’est pas une pénalité : c’est un engagement de responsabilité.
Enfin, cette nouvelle taxe garantit que l’électrification ne se fera pas au détriment des générations futures, et qu’une filière robuste de recyclage des batteries sera prête lorsque les premières vagues de batteries arriveront massivement en fin de vie. En d’autres termes, cette mesure marque une étape importante : celle où le marché des voitures électriques cesse d’être une innovation émergente pour devenir une industrie mature, structurée et durable.
La rédaction
Photos : LesVoitures.com

