Voici sûrement l’essai de la compacte sportive que beaucoup rêvent de conduire depuis sa révélation début 2015. C’était à Cologne et Ken Block en personne s’est chargé de présenter la sulfureuse Focus RS, 3ème du nom. Ford Performance s’est ensuite donné le temps et les moyens de la finaliser avec un énorme travail de développement. 9 mois plus tard, la version définitive de la Focus RS MKIII était née. Equipée de la transmission intégrale, une philosophie sécuritaire totalement opposée au plaisir de conduire, la plus sportive des Focus était attendue au tournant, c’est le cas de le dire, en termes de sensations…
Les ingénieurs de la marque américaine ont-ils réussi leur pari d’offrir, comme annoncé, une voiture qui procure également de fortes sensations ? La réponse à travers notre essai qui s’est déroulé aux alentours d’Avignon et sur les routes serpentées des Bouches-du-Rhône. Ces dernières pourraient clairement être au programme du WRC.
Elles nous ont accueilli pour une première “étape” d’essai dont le but était de nous faire découvrir, sur son terrain de jeu favori, les capacités de la Focus RS MKIII. Puis le lendemain, une armada de Focus RS a débarqué sur les pistes du circuit de Fontange, site de développement Michelin. Les objectifs de cette seconde journée étaient aussi novateurs que la nouvelle communication Ford Prendre un virage. Nous avons ainsi pris des virages en glisse, en drift et en banking…
Avant de s’intéresser à la Focus RS sur route et sur piste, intéressons-nous à son style. Beaucoup plus “bodybuildée” que la MKII, le millésime 2016 gagne logiquement en modernité mais sans perdre son puissant caractère visuel. Du spoiler avant à l’entrée d’air, en passant par les bas de caisse, les flancs, le traditionnel aileron arrière et l’énorme diffuseur, tout a été pensé pour provoquer une forte envie de passer derrière le volant de ce “Toy for boy” mais ce n’est pas tout.
Le bureau de style Ford et les équipes de Raj Nair, vice-président, directeur technique en charge du développement, ont uni leur expertise pour développer également une aérodynamique optimale. Elle prend forme, entre autres, sous les lignes acérées du diffuseur avant de notre version d’essai de teinte Signature Gris Stealth (option : 900 €). Certes, peu de bleu Ford sur cette livrée originale mais elle colle parfaitement à la Focus RS en rappelant joliment la carlingue des avions de chasse américains. Les étriers de freins Brembo bleu, coloris optionnel (170 €), en ressortent davantage derrière les superbes jantes forgées noires de 19” (option : 1 000 €).
A l’intérieur, on se sentirait presque dans une Focus normale. Même si on aurait apprécié des inserts en carbone et d’autres éléments en aluminium, les tachymètres, qui sont situés sur la planche de bord, dégagent une indéniable ambiance sportive digne de la griffe RS. Griffe que l’on retrouve brodée sur les sièges semi-baquet Recaro, cette fois totalement en adéquation avec l’auto. Sans oublier les surpiqûres bleues qui parsèment le cuir.
Il ne faut donc pas oublier que la Focus RS est une berline 5 places capable d’aller au supermarché, non pas pour drifter sur le parking, mais pour remplir le caddy d’une famille. Les 260 l de volume de chargement suffiront largement à cette utilisation alimentaire !
Contact ! En moins de temps qu’il ne le faut pour l’écrire, la Focus RS nous fait oublier le précédent paragraphe sur les manques de son habitacle. Les premières sonorités qui s’échappent du 2.3 l EcoBoost nous font espérer le meilleur. La prise en main de l’auto se fait rapidement et avec une facilité déconcertante tant la précision de la direction et la stabilité de la berline se font ressentir à chaque virage. Sur ces deux points, Ford Performance a parfaitement calibré et conçu spécifiquement l’assistance électronique et un soubassement capable de supporter le système AWD à vecteur dynamique de couple.
Ce sont toutes les entrailles de la Focus RS qui ont été soignées dans les moindres détails. A son volant, le sentiment ressenti est celui d’une voiture aboutie et homogène. Ainsi, la Ford Focus RS tolère beaucoup de choses sans perdre le cap, comme un fort freinage en courbe qui ne dérange absolument pas son châssis par exemple.
Quatre modes de conduite sont disponibles : Normal, Sport, Piste et Drift. En mode Sport, on entre dans un autre environnement sonore qui “pétarade à block”. Et lorsque l’on décide d’attaquer un minimum, l’agilité de la compacte sportive offre un plaisir immédiat avec une rare sensation de sécurité. Sans oublier une impression de légèreté générée à chaque instant malgré le poids conséquent de l’auto (1 599 kg à vide). Autres points positifs, la commande de boîte courte, précise et le freinage au mordant sans faille. Ces qualités exceptionnelles nous feraient presque oublier de parler des 350 ch (à 6 000 tr/min) issus de 2.3 l EcoBoost qui monte haut dans les tours avec une linéarité impressionnante. Le couple important de 440 Nm, disponible entre 2 000 et 4 500 tr/min, se fait également ressentir à chaque relance.
Du côté des performances, la Ford Focus RS abat le 0 à 100 km/h en 4,7 s et peut atteindre 266 km/h. Quant à sa consommation, nous nous contenterons de communiquer la donnée mixte constructeur de 7,7 l/100 km, chiffre que nous avons largement dépassé. Les émissions de CO2 sont de 175 g/km (malus : 2 200 €).
Place à la session circuit avec bien sûr le mode Drift, une exclusivité sur le segment des compactes sportives. Une fois enclenché et sur une piste comparable à un rond-point, nous nous prêtons à cœur à l’exercice. Ludique à un point exceptionnel, ce mode permet d’envoyer jusqu’à 100% du couple sur la roue arrière extérieure.
On accélère, on vire, on freine fort. La voiture part alors en dérive. Inutile alors de trop contre-braquer, il suffit de mettre “le pied dedans” pour drifter à la force de la motricité envoyée. Le plus exceptionnel est que l’opération se fait avec un naturel déconcertant. A ce moment précis le plaisir est intense. Ford a clairement réinventé le principe même de la transmission intégrale en proposant ce mode.
Ken Block a participé à son calibrage. L’épisode 4 de la série Rebirth of an Icon, qui nous fait vivre de l’intérieur et en totale transparence la conception de la Focus RS, met en exergue le travail du pilote américain (à voir sur : Vidéo : série « Renaissance d’une icône » consacrée à la Ford Focus RS, épisode 4, Ken Block se lâche !). Et à la limite de “cercle d’eau” que nous avons glisser, la preuve à travers la photo qui suit.
Mais ce n’est pas tout car la Focus RS dispose également d’un système Launch Control. Même s’il est compliqué et long d’aller le chercher dans le menu. Un choix logique conservateur d’embrayage, imaginez s’il était trop facilement paramétrable pour être utilisé à chaque passage du feu au vert !
Sur circuit, lors de journées de roulage privées, il offrira un max de sensations pour enchaîner de nombreux tours de piste. A ce titre Ford propose, en monte pneumatique optionnelle sur les jantes 19″ en alliage forgé, les Michelin Pilot Sport Cup 2 spécialement développés pour le “trublion mécanique” badgé RS. En série, l’auto est livrée avec des déjà très efficace Pilot Super Sport également élaborés spécifiquement pour la Focus RS. Les deux types de gomme étant de dimensions identiques : 235/35 R19.
La session circuit s’est terminée par quelques tours de piste “à Block” sur un tracé qui possède deux bankings. Puis un instructeur nous a démontré que, même sur trois roues, la Focus RS se joue des lois de la physique.
Comment conclure en quelques lignes ou mots notre essai de la très sérieuse et fun Focus RS, deux termes opposés pour décrire une voiture. Avant sa révélation finale, les effets d’annonce nous avaient fait espérer le meilleur mais avec une certaine retenue. Mais une fois dans nos mains, nous avons réalisé à quel point la dernière née grand public de la gamme RS est grisante. Ford a réussi son pari voire l’a dépassé surtout quand on découvre le tarif de base de la voiture : 39 600 €. Comparativement à une Mercedes-AMG A 45 AMG 4MATIC (381 ch), c’est 15 550 € de moins. Et les 57 900 € affichés par l’Audi RS 3 Sportback (367 ch) nous font écrire que le plaisir automobile a désormais un prix imbattable, celui de la Focus RS…
Texte, essai et photos : Frédéric Lagadec