Le 6 octobre 2025, une étape décisive a été franchie dans l’affaire du moteur 1.2 PureTech. Ce bloc 3-cylindres essence turbo, lancé en 2012 par le groupe PSA (aujourd’hui intégré à Stellantis après sa fusion avec Fiat-Chrysler), équipe depuis plus d’une décennie une multitude de modèles populaires : Peugeot 208, 308, 2008, 3008, 5008, mais aussi Citroën C3, C4, C4 Cactus, C5 Aircross, sans oublier les DS 3, DS 7 Crossback, ainsi que des Opel Corsa, Mokka et même certaines Fiat Tipo. En tout, plus de 500 000 véhicules circulant en France seraient concernés. Des pannes et rappels en série et le mécontentement des clients ont poussé l’État à ouvrir une enquête.
Dix ans après son lancement, le moteur 1.2 PureTech (ex-PSA, aujourd’hui Stellantis), censé incarner la modernité et l’efficacité énergétique avec pas moins de 210 brevets, est devenu synonyme de pannes récurrentes et de coûts d’entretien exorbitants. Les critiques se concentrent sur un problème majeur : la courroie de distribution humide, immergée dans l’huile moteur, qui se dégrade parfois dès 40 000 km, bien en deçà des préconisations constructeur (souvent fixées à 100 000 km ou 6 ans). Les fragments de caoutchouc issus de cette usure prématurée obstruent le circuit de lubrification, provoquant des casses moteur, des pertes de puissance brutales, une surconsommation d’huile et, dans certains cas, la nécessité de remplacer intégralement le bloc.
Face à l’ampleur du phénomène, une association loi 1901, baptisée Victimes du PureTech, a vu le jour en 2024. Elle regroupe aujourd’hui plus de 500 adhérents et anime une communauté de plus de 56 000 membres sur Facebook. Son objectif est clair : obtenir la reconnaissance officielle d’un vice de conception et pousser Stellantis à assumer ses responsabilités. En juin 2025, l’association a transmis 425 signalements documentés au Service de Surveillance du Marché des Véhicules et des Moteurs (SSMVM), organisme public créé après le Dieselgate pour contrôler la conformité technique des véhicules et la pertinence des actions correctives des constructeurs.
Ces signalements ont conduit à l’ouverture d’une enquête gouvernementale sur le moteur 1.2 PureTech, confirmée par un courrier signé de Catherine Bieth, cheffe du SSMVM, daté du 6 octobre 2025. L’administration a exigé de Stellantis la remise de rapports techniques, données de maintenance et analyses internes. Les premières hypothèses évoquent deux causes principales :
- une qualité insuffisante du matériau de la courroie, particulièrement sensible à certains types d’huile moteur,
- une conception inadaptée du système de lubrification, mal calibrée pour les conditions réelles d’utilisation.
Ces pistes doivent encore être validées par des tests complémentaires avant toute décision officielle. Mais pour les automobilistes concernés, souvent confrontés à des factures dépassant 5 000 € pour un remplacement moteur, l’ouverture de cette enquête représente une première victoire symbolique.
Le groupe Stellantis, qui commercialise encore le moteur PureTech, sous différentes déclinaisons et évolutions (75, 100, 110 et 130 ch), continue de défendre la fiabilité de son bloc, tout en ayant discrètement modifié certains composants sur les versions les plus récentes. Mais la pression monte : si l’État venait à conclure à un défaut structurel, le constructeur pourrait être contraint à lancer une campagne de rappel massive, avec des conséquences financières et d’image considérables.
En attendant les conclusions officielles, l’affaire du moteur 1.2 PureTech illustre une nouvelle fois la fragilité de l’industrie automobile face aux choix technologiques risqués. Ce moteur, présenté à son lancement comme un modèle de sobriété et d’innovation, pourrait bien devenir l’un des plus grands scandales techniques de l’histoire récente de l’automobile française.
La rédaction
Photos : Stellantis
