Une Alfa Roméo, comment ça marche ? Cette célèbre interrogation de l’ancien spécialiste sciences du petit écran, Michel Chevalet, nous nous la sommes posée en arrivant pour essayer cette nouvelle Alfa Roméo Giulia. Une Alfa Romeo qui naît ce n’est pas anodin, la marque véhicule une très forte cote d’amour. Alfa Romeo, c’est un monde de passionnés, les “Alfistes” qui ne jurent que par cette marque. Si j’osais une comparaison, je parlerais d’une secte mais qu’avec les côtés positifs.
La naissance d’un nouveau modèle chez cette marque est donc d’autant plus attendu et scruté que cela en devient un événement. Le nom de Giulia n’est pas choisi par hasard, car il fait référence à un modèle à succès du même nom produit entre 1962 et 1977 et dont le fer de lance sportif a été incarné par la Giulia GT.
Pour ce nouveau modèle, Alfa Romeo est parti d’une feuille blanche. Un ingénieur Ferrari et quelques milliards plus tard, nous voici donc dans le Lubéron pour l’essai. Le Lubéron a cette particularité de posséder des routes sinueuses et en assez mauvais état ce qui vont nous permettre de tester et de mettre à mal le châssis, les suspensions et la boîte de notre modèle d’essai.
La référence et, par extension, la cible de la Giulia se trouve être le secteur des familiales premium; autrement dit la Série 3 de chez BMW, l’Audi A4 et la Mercedes-Benz Classe C. Selon le constructeur, le gros des ventes (un objectif de 3 000 unités annuelles est espéré) sera constitué des achats de véhicules d’entreprises. Ce que Alfa a parfaitement compris c’est qu’un commercial, un cadre ou un directeur peut également être un père de famille qui aime se faire plaisir en vacances avec sa voiture sans pour autant sacrifier le confort et la place. Car, c’est là le credo de cette Giulia : le plaisir distillé aux roues arrière sur toutes les versions.
Une Alfa Romeo, c’est d’abord une gueule et là, les avis sont partagés. Côté design, on pourrait lui reprocher un aspect trop consensuel, trop germanique, pour simplifier les choses. Alors, on pourrait s’attarder, il est vrai, sur ce dessin des feux arrière qui fait penser à une Audi A4 mais, peut-on vraiment reprocher à Alfa Romeo de vouloir atteindre l’excellence ? Personnellement, je trouve qu’elle fait la parfaite synthèse entre le côté fougueux latin et le côté rigoureux germanique. Du reste, lors de notre retour en convoi pour aller à la gare, tous les regards se tournaient vers cette face avant très caractéristique. Trêve de paroles, parlons de la voiture en elle-même désormais.
Le premier sentiment qui se dégage lorsque l’on monte à bord est un sentiment de robustesse et de qualité. Un vrai travail a été fait concernant ces domaines. Une fois la position de conduite quasi idéale trouvée, on apprécie le confort des sièges. C’est d’ailleurs ce qui est le plus impressionnant : une sorte de baquet pullman, un bon maintien avec un confort optimal.
Pour sa Giulia, Alfa Romeo propose une gamme de moteurs essence restreinte en essence. En dehors du très exclusif et très désirable moteur V6 2.9 l biturbo de 510 ch qui équipe la version Quadrifoglio, la marque va proposer en automne un 2.0 l essence de 200 ch.
Lors de nos essais, seuls deux moteurs diesel étaient proposés, le 2.2 JTD 150 et celui que nous avons eu, le 2.2 JTD 180. Alfa Romeo proposera ultérieurement un petit moteur 2.2 JTD 136 afin de compléter sa gamme. D’emblée, le moteur de 180 ch semble être celui qui convient le mieux à cette voiture. Notre parcours a mélangé nationales et petites départementales et le bilan est toujours le même : cette configuration mécanique, si on excepte son côté non discret, va à ravir à cette voiture.
Sur nationales, vous bénéficiez d’un confort très appréciable tandis que les relances en sorties de virages sont largement suffisantes…si tant est que l’on soit assez haut en régime, le couple maxi de 450 Nm est délivré à 3 750 tr/mn, exprimés d’ailleurs en “giri” sur le compte-tours. Si ce moteur 2.2 JTD 180 dont la consommation mixte est annoncée pour 4,2 l/100 km paraît globalement homogène, il laisse présager quelques doutes sur la vélocité des versions inférieures qui réclameront certainement que vous cravachiez la voiture davantage et ce, malgré un poids inférieur à 1 400 kilos à sec. Le couple est donc de 450 Nm pour les versions en boîte automatique équipant les motorisations 150 ch et 180 ch mais il tombe à 380 Nm pour les versions en boîte mécanique. Les performances atteintes au 0 à 100 km/h seraient de 8,4 s et 8,2 s pour les versions manuelles et automatiques du 2.2 JTD 150 et 7,2 s et 7,1 s pour les mêmes versions sur le moteur 2.2 JTD 180. Il faut d’ailleurs privilégier fortement le confort et la rapidité de la boîte automatique à 8 rapports AT8 face à la boîte mécanique accrochant et se plaçant mal. Notez que pour 200 € de plus, vous pouvez obtenir les très belles palettes qui, pour plus d’agilité, ne sont pas fixées.
Voiture lancée sur les virolos menant à Bonnieux, nous sommes bluffés par le comportement de la voiture. Le châssis est taillé pour absorber tous les défauts et replacer toujours la voiture là où on le souhaite. Les suspensions ne pompent pas et filtrent parfaitement les nids de poule notamment grâce à la technologie Alfa Link qui, en proposant une suspension à double bras et un axe semi-virtuel, confère à la voiture un tempérament sain et direct et procure la possibilité d’accélérer fort dans les virages. Autre point très positif, la direction. Elle est claire, nette et sans bavure. Elle jouit d’un rapport de direction des plus directs, 11.8, quand la concurrence propose 15. La remontée d’informations se fait sans encombre. La voiture tourne avec une facilité déconcertante et fait passer les autres de son espèce pour archaïques.
Le plaisir de conduite, prépondérant chez Alfa Romeo, est lié également à la sécurité passive et active. Ainsi, la Giulia propose en avant-première le système IBS qui assure une réponse plus qu’immédiate du système de freinage et des vibrations moindres lors du déclenchement de l’ABS. La distance d’arrêt de 100 km/h à 0 km/h serait de 38,5 mètres voire 32 mètres sur la version sportive, ce qui, constitueraient un record. Notons au passage que ce système est couplé à un nouveau système d’alerte de collision frontale et de freinage autonome de série qui anticipe afin de prévenir les accidents.
Du point de vue du tempérament, cette Alfa Romeo Giulia signe un quasi sans faute même si, comme nous l’avons souligné précédemment, le moteur est un peu trop présent dans l’habitacle et l’ESP pas totalement déconnectable. Une alliance assez subtile entre une voiture taillée pour la route avec les enfants et une voiture qui demande à révéler son tempérament sportif sur les petites routes via le changement de position sur le DNA pour Dynamique, Naturel et Advanced Efficiency et qui transfigure le comportement, passant de la voiture “pépère” à la boule de nerfs dont la répartition des masses, idéale est de 50/50.
Le plaisir de conduite, encore et toujours, peut-être d’ailleurs au détriment du plaisir tout court. La nouvelle Giulia se dote de l’équivalent du système MMI de chez BMW qui est une grosse molette qui permet d’accéder à la toutes les fonctionnalités. Passons sur le fait que ce Rotary Pad ne soit pas tactile, il est lié à un écran que nous avons trouvé assez petit (deux tailles sont proposées) et qui souffre de la réverbération de l’environnement. Le système est tout de même intuitif et assez aisé à la navigation. Je parle bien évidemment de la navigation dans les menus, pas de la navigation tout court liée au GPS qui frise le désastre. S’agissait-il d’un réglage pour un GPS piéton tant le système a voulu nous faire passer par des escaliers ou sentes impraticables ? Manifestement, la notion d’altitude n’est pas connue puisqu’il était évident que le système ne savait pas faire la différence entre deux routes superposées et proposait donc, de façon très aléatoire, une solution de navigation farfelue. Le temps de recalibrer les paramètres de navigation et de s’apercevoir que la climatisation ne fonctionne plus lorsque le moteur est coupé par le Start&Stop, clignotant et nous voilà repartis. Clignotant, clignotant, clignotant, tiens, il ne revient pas en position, plus qu’agaçant à la longue mais, comme on dit, “c’est une Italienne”. Tous ces petits défauts n’entachent cependant pas le bilan très positif de notre essai. Passons le son assez moyen lors de la fermeture des portes, voire affreux pour ce qui est du coffre. Mais vous pourrez rattraper tout ça moyennant 540 € pour bénéficier du très qualitatif système audio Harman Kardon de 900 watts.
Côté tarifs, la gamme débute à 30 900 € avec le diesel de 136 ch en finition Giulia; il existe 5 niveaux de finition : Giulia, Pack Business qui devrait représenter le gros des ventes, Super, Lusso et Quadrifoglio. Ce dernier est lié à la version de 510 ch qui s’offre à partir de 79 000 €. Notez que l’équipement de base inclut, entre autres, le Start&Stop, les systèmes de freinage et d’anticipation cités plus haut, la climatisation bi-zone, le régulateur de vitesse, le frein électronique, le capteur de pluie, les feux à LED, et le volant gainé de cuir. Pour conclure, la nouvelle Giulia surprend et son design très réussi et unique est en accord avec les prestations proposées une fois à son bord. Les berlines allemandes ne sont plus “seules au monde”…
Essai, texte et photos : Charles Oulan