Le ministère des Transports tire la sonnette d’alarme. Après avoir ouvert une enquête en août 2025, il vient de franchir une étape décisive en mettant en ligne un questionnaire national destiné à recueillir les témoignages d’automobilistes victimes de ce que l’on appelle désormais le « freinage fantôme ». Ces arrêts brutaux, déclenchés sans raison par des véhicules équipés de systèmes d’assistance à la conduite, inquiètent au plus haut point les autorités.

L’affaire a éclaté au grand jour en avril 2025, lorsqu’une conductrice lyonnaise, Joanna Peyrache, a vu sa Peugeot 208 s’immobiliser soudainement sur l’autoroute A40 dans l’Ain, sans obstacle apparent. Son récit, largement relayé, a provoqué une vague de réactions et mis en lumière le phénomène de freinage fantôme, ou de freinage intempestif, que de nombreux automobilistes avaient déjà subi en silence. Depuis, les témoignages affluent, au point qu’un collectif s’est formé sur les réseaux sociaux pour alerter sur ces incidents. Désormais, il est donc possible de signaler un freinage fantôme grâce au questionnaire mis en ligne par le ministère des Transports.

Les signalements de freinage fantôme (freinage intempestif) ne concernent pas un constructeur isolé. Des propriétaires de Peugeot, Renault, Volkswagen, Audi, Škoda, Tesla ou encore Honda affirment avoir vécu la même expérience. Tous ces véhicules partagent un point commun : l’intégration du freinage d’urgence automatique (AEB), un dispositif censé sauver des vies mais qui, dans certains cas, semble se retourner contre ses utilisateurs.

Le Service de Surveillance du Marché des Véhicules et des Moteurs (SSMVM), chargé de l’enquête, concentre ses soupçons sur ce système. L’AEB repose sur une combinaison de caméras et de capteurs radar ou lidar, capables de détecter un obstacle et de déclencher un freinage immédiat. Depuis la mise en place de la norme européenne GSR 2, il est obligatoire sur tous les nouveaux modèles homologués depuis le 7 juillet 2022 et sur toutes les voitures neuves commercialisées depuis le 7 juillet 2024.

Mais ce qui devait être une avancée majeure en matière de sécurité routière se transforme en menace. Les experts évoquent des défaillances logicielles, des perturbations climatiques comme de fortes pluies ou du brouillard, voire des problèmes de calibrage des capteurs après un remplacement de pare-brise ou un choc. Dans certains cas, un simple défaut d’entretien suffirait à provoquer un freinage fantôme intempestif à 130 km/h, avec des conséquences potentiellement dramatiques.

Le questionnaire mis en ligne le 22 octobre 2025 vise à centraliser ces incidents. Il doit permettre de mesurer l’ampleur réelle du problème, d’identifier les modèles les plus touchés et de comprendre dans quelles conditions ces freinages se produisent. Jusqu’ici, les victimes n’avaient à leur disposition qu’un formulaire technique peu accessible. Désormais, l’État français appelle massivement les conducteurs à témoigner, afin de dresser une cartographie précise du phénomène. Vous pouvez accéder au questionnaire pour signaler un freinage fantôme, aussi appelé « freinage intempestif » en cliquant sur l’image située ci-dessous.

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Les résultats de cette enquête liée au freinage fantôme sont attendus d’ici la fin de l’année. Si des défauts de conception venaient à être confirmés, les conséquences pourraient être lourdes pour les constructeurs : rappels massifs, mises à jour logicielles obligatoires, voire sanctions financières. Car derrière chaque témoignage se cache une réalité inquiétante : un véhicule moderne, censé protéger ses occupants, peut devenir une menace pour eux et pour les autres usagers de la route.

Enfin, le dossier du freinage fantôme révèle le paradoxe de l’automobile connectée. Plus sophistiquée que jamais, elle promet une sécurité accrue grâce à l’électronique et aux algorithmes. Mais elle expose aussi les conducteurs à des défaillances invisibles, impossibles à anticiper. Le freinage fantôme n’est plus une anecdote isolée : il est désormais un problème de sécurité publique.

La rédaction

Photos : Joanna Peyrache, Opel et ministère des Transport