Le groupe Renault traverse une période de profond remaniement, marquée par des départs de figures clés et une réorganisation de ses marques. Dernier événement en date : le départ de Denis Le Vot, directeur emblématique de Dacia, qui quitte le constructeur après avoir été écarté de la succession à la direction générale du groupe. Ce départ s’inscrit dans une dynamique plus large, avec le retrait de Luca de Meo, ancien PDG, et de Gilles Vidal, directeur du design, ainsi que le très probable repositionnement stratégique de la filiale électrique Ampere.

Après 35 ans de carrière au sein du groupe Renault, Denis Le Vot quitte ses fonctions à la tête de Dacia, qu’il dirigeait depuis janvier 2021. Ce Breton, fils d’artisan, avait gravi les échelons du constructeur en occupant des postes de direction en France, en Russie, en Turquie et même chez Nissan Amérique du Nord. Sous sa houlette, Dacia a connu une transformation majeure : la Sandero est devenue la voiture la plus vendue aux particuliers en Europe, tandis que le Duster, le Jogger et le Bigster ont renforcé l’image de la marque comme une alternative abordable aux constructeurs automobiles généralistes.

Malgré son profil apprécié en interne, notamment pour sa rigueur et son côté accessible, Denis Le Vot n’avait pas été retenu pour succéder à Luca de Meo à la tête de Renault Group. Ce choix a été vécu comme une déception par de nombreux collaborateurs, tant Le Vot incarnait les valeurs de proximité et de pragmatisme chères à Renault.

Dacia Renault Group

Pour lui succéder, en tant que nouveau Chief Executive Officer (CEO) Dacia, Renault a nommé Katrin Adt, ancienne dirigeante de Smart et cadre chevronnée de Mercedes-Benz. Juriste de formation, elle apporte une expérience internationale et une culture premium à une marque historiquement positionnée sur le low-cost. Ce choix peut sembler paradoxal, mais il reflète une volonté de repositionner Dacia dans un contexte de transition vers l’électrique et d’élargissement de sa clientèle. Katrin Adt aura pour mission de consolider les acquis commerciaux de Dacia tout en préparant la marque à relever le défi de l’électrification. Elle travaillera sous la supervision de Fabrice Cambolive, nommé Chief Growth Officer, dans une nouvelle organisation visant à accélérer les prises de décision et à renforcer la proximité avec les différents marchés automobiles internationaux sur lesquels Dacia est présent.

Autre mouvement significatif : la réintégration attendue d’Ampere directement au sein de Renault Group, la filiale dédiée aux véhicules électriques et aux logiciels. Cette décision viserait à renforcer la cohérence stratégique entre les marques et à accélérer le développement de modèles électriques compétitifs. Philippe Brunet, ancien responsable de l’ingénierie chez Ampere, devient Chief Technology Officer (CTO) de Renault Group et d’Ampere, avec pour mission de piloter l’innovation et l’exécution des projets, notamment avec la nouvelle Twingo 100 % électrique développée en Chine. Précisons que Renault Group avait décidé d’annuler, fin janvier 2024, l’introduction d’Ampere en bourse car, à l’époque, les conditions de marché n’étaient pas réunies. Ampere devrait donc réintégrer Renault Group.

Rappelons, en parallèle, que Gilles Vidal, directeur du design, a également quitté récemment Renault pour retourner chez Stellantis. Figure majeure du renouveau stylistique de Renault, il avait contribué à repositionner l’image de la marque avec des modèles emblématiques comme la nouvelle Renault 5 100 % électrique. Son départ laisse un vide dans une période où le design joue un rôle crucial dans la différenciation des véhicules électriques et la conquête de nouveaux marchés.

Tous ces mouvements traduisent une volonté de Renault Group de se réinventer face aux mutations du secteur automobile. La montée en puissance de l’électrique, la pression concurrentielle de groupes comme Stellantis, et les attentes croissantes des consommateurs imposent une agilité nouvelle. Le départ de figures historiques comme Denis Le Vot ou Gilles Vidal, conjugué à l’arrivée de profils internationaux comme Katrin Adt, dessine les contours d’un groupe en pleine transformation depuis le départ de Luca de Meo.

Enfin, Renault Group mise désormais sur une gouvernance resserrée, une stratégie de croissance unifiée, et une accélération de l’innovation pour rester compétitif. Le retour d’Ampere dans le giron du groupe, la nomination de Provost, et la réorientation de Dacia sont autant de signaux d’un changement de cap assumé.

La rédaction

Photos : Dacia et Renault Group