Le budget carburant des ménages pèse de plus en plus lourd, jusqu’à atteindre un point de non retour pour beaucoup. Devant cet état de fait, de nombreuses initiatives sont créées pour lancer un appel à la manifestation le 17 novembre 2018. Alors, coup d’épée dans l’eau ou nouvelle révolution française ? Décryptage…
Combien seront-ils à manifester leur mécontentement contre le prix des carburants le 17 novembre prochain sur les routes de France ? Le mouvement prend une ampleur inédite sur les réseaux sociaux. Entre ceux qui sont “pour” et les “contre”, la guerre est déclarée à coups de hashtags.
A l’origine du mouvement, des citoyens à l’image de Priscilla Ludosky, une jeune femme de 32 ans qui vit en banlieue parisienne à Savigny-le-Temple et qui a lancé la pétition qui atteint aujourd’hui un demi-million de signatures. Pour elle, il devient inconcevable pour une famille modeste d’avoir un budget de 300 euros d’essence. Elle rappelle que pour un travailleur habitant en banlieue ou en province, la voiture est un outil indispensable. L’objet de la démarche est d’obliger le gouvernement à réfléchir aux taxes, et surtout à des solutions alternatives comme le co-working ou le télé-travail. Elle met également l’accent sur l’absence de réelle volonté concernant les carburants plus propres. « Quand j’ai vu mon plein passer de 45 à 70 euros, j’ai cherché à savoir de quoi était composé le prix », explique la jeune femme. « Je me suis rendu compte que le gouvernement pouvait agir en baissant les taxes. C’est donc ce que je lui demande » ajoute Priscilla Ludosky, dans les colonnes du journal Le Parisien.
En effet, qui n’a pas l’impression aujourd’hui de se faire braquer à chaque remplissage de réservoir ? Les prix des carburants augmentent, les PV pleuvent depuis l’arrivée des radars automatiques, le contrôle technique se renforce et l’appareil répressif apparaît comme de plus en plus oppressant et injuste.
Les organisateurs sont les premiers surpris par l’ampleur de la révolte, et l’étendue des blocages prévus aux 4 coins du pays. Dans chaque ville, un comité se monte avec pour objectif de bloquer les routes ce 17 novembre.
D’autres initiatives voient le jour, comme le groupe Facebook “La France en colère” créé le 15 octobre et dont le nombre de membres dépasse les 100 000 à ce jour. L’association “40 millions d’automobilistes” lance l’opération “Coup de pompe” exhortant les français à envoyer leur ticket de carburant à Macron. Pour accompagner le ticket, un courrier de protestation, téléchargé à plus de 800 000 exemplaires en un mois. Le groupe “Blocage 17 novembre 2018 – En direct” publie même une carte Google du blocage du 17 novembre 2018.
Devant l’ampleur du phénomène, la récupération politique n’a pas tardé. De la part du mouvement de Nicolas Dupont-Aignan « ll faut bloquer toute la France le 17 novembre, il faut que la population française dise à ce gouvernement : maintenant ça suffit », a déclaré sur RMC le président de Debout la France (DLF). De la part également du Rassemblement National de Marine Le Pen « L’ensemble de nos élus et délégués départementaux, de nos fédérations, rejoindront la contestation qui est en train d’émerger » (Europe 1).
Une récupération dénoncée par les organisateurs de l’événement qui rappellent n’être rattachés à aucun mouvement politique. Ce sont les citoyens qui se mettent en mouvement, pas les politiques, rappelle Eric Drouet sur BFM TV.
Mais à qui profite la confusion ? Sur Twitter les défenseurs des hausses de taxes sur les carburants, à commencer par les militants du parti gouvernemental réagissent avec le hashtag “sansmoile17”. A coups de visuels, de hashtags et d’éléments de langage, tout est fait pour politiser le débat, ceci quitte à brandir des termes qui font peur “fachosphère”, “extrêmes”, “pollueurs”.
Dans cette guerre de communication, on en oublierait presque les écologistes qui rappellent « moins de bagnoles, moins de pollution, moins d’individualisme. »
En France, on s’attend principalement à des blocages d’axes routiers. L’A8 à hauteur de Fréjus, ou encore Antibes, Cannes, Paris, Bordeaux, Rennes, ou Caen. C’est l’ensemble du territoire qui compte mener la fronde et montrer sa colère. D’autant que les petites villes ne sont pas en reste avec une multiplication des initiatives. Les organisateurs de ces groupes devront passer par la case autorisation de la préfecture pour manifester.
Et après ? Une chose semble acquise, c’est l’importance de la mobilisation. Nous verrons le 17 novembre au soir l’ampleur des différentes manifestations. Mais, ce qui semble certain, c’est que l’automobiliste français est à bout. Poussé dans ses derniers retranchements par une fiscalité toujours plus lourde, un carburant toujours plus cher, une politique répressive comme jamais, le conducteur est probablement en train de perdre patience. Quand il ne sert pas de prétexte à financer le train de vie de l’état, il se trouve montré du doigt pour son impact carbone. Les signes du ras le bol sont nombreux, à commencer par le nombre de radars incendiés sur le bord de nos routes.
Quelles sont les actions concrètes du gouvernement pour s’assurer que la transition écologique sera accessible à tous ? A une époque où rouler dans Paris devient quasiment impossible, si on a pas les moyens de se payer une voiture neuve, il devient également très compliqué d’accéder à la mobilité quand on habite en campagne, à cause du prix d’un litre d’essence.
A défaut de répondre à ces questions essentielles, les gens qui nous gouvernent vont devoir affronter une colère qui semble bien réelle et justifiée. La suite le 17 novembre…
Texte : Niko Laperruque