Dans un revirement stratégique majeur, Stellantis rejoint Renault dans l’abandon de la technologie hydrogène pour ses véhicules utilitaires. Le groupe automobile franco-américain interrompt soudainement le développement de ses modèles à pile à combustible, mettant fin à un programme industriel dont le lancement commercial était imminent. Les plans de production à Hordain, en France, et à Gliwice, en Pologne, sont annulés, tout comme le projet de lancement de fourgons propulsés par hydrogène prévu pour cet été. Cette décision prise par Stellantis va fragiliser fortement la filière industrielle liée aux véhicules à hydrogène.

Cette décision affecte directement la coentreprise Symbio, créée avec les équipementiers français Michelin et Forvia. Stellantis, partenaire industriel et client principal, se retirera du programme lié au développement de véhicules à hydrogène à l’horizon 2026. Ce départ, jugé inattendu par les deux partenaires, met en péril l’équilibre opérationnel de Symbio dont près de 80 % de la production projetée reposait sur les commandes de Stellantis. Michelin et Forvia évoquent dans un communiqué des « conséquences opérationnelles et financières irréversibles », mettant en garde sur l’impact social pour les 640 salariés de Symbio en France et à l’étranger. Il y a quelques jours, à l’échelle de l’Île-de-France, c’est l’entreprise de taxis Hype qui a décidé de ne plus utiliser ses Toyota Mirai fonctionnant à l’hydrogène.

Stellantis véhcicules à hydrogène Michelin

Quelques mois plus tôt, Renault Group annonçait la cessation d’activité de sa filiale Hyvia, issue d’un partenariat avec l’américain Plug Power. Le motif évoqué était clair : « l’émergence trop lente des écosystèmes de mobilité hydrogène en Europe » et les « coûts de développement très importants que nécessite l’innovation hydrogène ». Chez Stellantis, les raisons invoquées pour justifier ce retrait sont similaires : infrastructures de ravitaillement trop peu développées, besoins d’investissements colossaux et absence de perspectives économiques solides. Le directeur des opérations en Europe, Jean-Philippe Imparato, indique que l’adaptation aux normes européennes de réduction des émissions CO₂ mobilise déjà des ressources financières considérables, contraignant le groupe à redéfinir ses priorités. Sur ce dernier point, il s’agit bien sûr des voitures électriques qui seront imposées en 2035 au sein de l’UE.

Malgré l’abandon de cette filière, Stellantis assure que les effectifs des sites concernés ne seront pas affectés. L’entreprise semble vouloir circonscrire les répercussions à son périmètre direct, bien que les retombées sur ses partenaires industriels soient déjà perceptibles.

La déroute du domaine des véhicules à hydrogène ne se limite pas à la France. Au Japon, Honda a récemment reporté la production de piles à combustible de prochaine génération, initialement prévue pour 2028. Ce retard est attribué aux « changements récents dans l’environnement global du marché de l’hydrogène ». Tandis que Toyota poursuit ses recherches, le constructeur tchèque Skoda (groupe Volkswagen) explore de nouveaux partenariats, notamment avec Hyundai, pour intégrer cette technologie.

Enfin, le désengagement de Stellantis, après celui de Renault, illustre le scepticisme croissant des industriels vis-à-vis des véhicules à hydrogène dans le secteur automobile. Bien que certains acteurs persistent, les obstacles liés à l’infrastructure, à la rentabilité et à l’adhésion du marché freinent fortement leur déploiement. L’avenir de la mobilité hydrogène semble désormais suspendu à des avancées structurelles plus profondes.

La rédaction

Photos : Stellantis