C’est à douze ans que Cathy Dubuisson reçoit en cadeau son premier appareil photo. La jeune fille qui baigna dans l’univers automobile depuis son enfance, grâce à son père, devient vite une habituée des circuits et des rallyes. Elle aiguise son œil sur les rassemblements auxquels elle participe. C’est avant tout la passion de l’automobile, des lignes, de la dualité entre fixation des espaces et vitesse qui anime l’artiste.
En effet, Cathy ne le savait pas encore mais la rencontre de ses deux passions lui donnera un métier, celui de photographe. Depuis toute petite, elle vit au rythme des championnats automobiles. Elle se souvient avoir attendu sous la pluie que les voitures passent en spéciale sous ses yeux éblouis. Aujourd’hui encore, elle s’émerveille face à l’aurore en se disant qu’elle a bien fait de se lever pour voir un tel spectacle. Ses yeux pétillent devant la beauté que lui offrent les ombres qui grandissent ou s’amenuisent sur les flancs des montagnes. Patiemment, à l’affût du moindre mouvement, elle attend, allongée sur les bas-côtés de la route, que les voitures des rallyes historiques passent devant son objectif.
Cathy vit dans le mouvement, elle ne fait pas poser ses modèles. Elle s’adapte à elles. Elle ne pratique pas la photographie en studio car cela l’ennuie, elle préfère les bruines et les pluies au confort des intérieurs. Cathy est une femme du dehors, elle ne veut pas “modifier la réalité”, la lumière de son travail est naturelle, sinon rien.
Chaque reportage est une balade, une promenade. Cathy fige des événements vivants. C’est d’ailleurs au hasard d’une balade nocturne lors du Tour Auto qu’elle s’arrêta pour prendre en photo les courbes de la Ford GT 40 de 1964 qui lui offrit le Grand Prix de la Plus Belle Photo de l’année 2012 au Festival Automobile International 2013. « La voiture était là, à moi d’en faire ressortir la plus belle photo. Si j’étais passée un mètre plus loin, je n’aurais peut être pas vu ces courbes qui s’offraient à moi… » confie-t-elle. Reconnaître le modèle de l’automobile, si elle ne nous le dit pas, est quasiment impossible. Même les passionnés s’y sont trompés. En revanche, tous furent d’accord pour reconnaître l’ambiguïté de la photo. Sous le regard de Cathy, les courbes nobles de la Ford s’apparentent au corps nu d’une femme. Sensualité et romantisme émanent de cette photo qu’elle a baptisée “Leçon numéro 40”, en clin d’œil à Aubade. Voici LE cliché de l’année 2012, une leçon !
Elle avait déjà été nommée en 2010 pour ledit prix mais n’avait pas gagné. En 2013, le jury, constitué de femmes et d’hommes de la profession, ont choisi sa photo parmi toutes ces images d’anonymes. En effet, le jury ne sait pas qui a réalisé les clichés quand ils élisent celui qui les émeut le plus. C’est cinq minutes seulement, avant de monter sur scène, que la photographe apprend qu’elle n’est pas seulement nommée cette année, mais qu’elle a gagné ! C’est donc totalement prise au dépourvu et sous le coup de l’émotion que Cathy est montée sur scène, devant six cents personnes et sous les ovations, pour se voir remettre le Grand Prix de la Plus Belle Photo de l’année 2012. Fière d’être saluée par ses pairs, Cathy confie qu’elle l’est d’autant plus de faire des photographies « qui plaisent autant aux hommes qu’aux femmes. »
Plaire autant aux hommes qu’aux femmes… Amusant pour cette femme que les milieux masculins ont accaparée. Elle a acquis leur confiance et s’est toujours sentie à l’aise entourée d’échappements et de discussions sur les moteurs. Et quand Cathy n’exerce pas sur les circuits, les rallyes ou encore les lancements de produits automobile, c’est sur les chantiers que la photographe s’exprime et se sent bien. C’est au hasard des échafaudages qu’elle fige avec poésie des instants de vie et des matériaux bruts.
Autodidacte, cette passionnée est toujours prête à ajouter des cordes à son arc. Relever des défis est un jeu. Depuis quelques temps elle parcourt les routes de France. Quand Cathy ne s’arrête pas dans les Relais et Châteaux pour rencontrer les Chefs étoilés, elle suit des collectionneurs de belles cylindrées dans leurs univers. Elle part avec eux à la rencontre d’artisans horlogers ou de galeristes, d’adresses de charmes et de passionnés. Ses portraits sont singuliers, ses reportages à son image, vivants, érudits, passionnants.
Texte : Maria Labzaë
Photos : © Cathy Dubuisson