Les 20, 21 et 22 juillet derniers ont eu lieu les Rencontres Peugeot Sport à Magny-Cours. Ce championnat, disputé sur 6 meetings dans l’année, rassemble des centaines de pilotes venus en découdre sur la piste au volant de bolides de la « marque au lion ». Si les meetings « classiques » rassemblent plusieurs modèles (208, 308, mais également 206, 207 ou encore RCZ, toutes en version « Racing Cup »), celui de Magny-Cours fut particulier. En effet, en plus des classiques courses de type Sprint, une nouveauté a fait son apparition cette année sur le tracé nivernais de Magny-Cours : une course relais 208 Racing Cup de 24 heures ! Seule une édition avait eu lieu en 2006, à l’époque de la 206 Racing Cup. LesVoitures.com était présent dans le baquet de la Peugeot 208 au numéro 208.
Autant dire que les pilotes aguerris comme débutants ne pouvaient manquer à l’appel de cette course, qui rappelle à tout amateur de sport automobile la grande épopée des 24 Heures du Mans. Je n’ai pas fait exception à la règle; comment aurais-je pu refuser cette invitation aux Rencontres Peugeot Sport ? Passée l’appréhension de se retrouver en piste pendant 24 heures, avec une soixantaine de voitures pilotées par des furieux qui maîtrisent la petite 208 en virtuoses, l’excitation fut palpable. Plongez avec moi dans ce week-end en immersion dans la peau d’un pilote d’endurance.
Pour ce grand retour de l’endurance au sein des Rencontres Peugeot Sport, le rendez-vous ne pouvait qu’être grandiose. Dès l’arrivée dans les paddocks, les visiteurs et les pilotes furent accueillis par les véhicules de compétition Peugeot Sport que sont les 208 WRX, 308 TCR, 3008 DKR Maxi, sans oublier les 905 et 908 vainqueurs au Mans, qui rappellent à quel point Peugeot aime le sport automobile et trône régulièrement sur la plus haute marche des podiums internationaux.
Mais la vraie star de ces Rencontres Peugeot Sport à Magny-Cours, c’est elle ! La 208 Racing Cup. De loin, le béotien pourrait y voir une simple 208 décorée façon course et rabaissée. Cependant, un simple coup d’œil par la vitre latérale (fixe et en polycarbonate) permet de comprendre que nous sommes bien en présence d’une véritable auto de course ! Intérieur totalement vidé, arceau soudé intégral, un seul baquet et un tableau de bord réduit à sa plus simple expression, le doute n’est plus permis. Le petit 1 600 cm3 de 140 chevaux n’aura probablement aucun mal à tracter les (seulement) 950 kilos de l’auto ainsi allégée.
Arrivés dans la loge Peugeot Sport, nous en apprenons un peu plus sur nos teams. En effet, deux voitures ont été mobilisées par le constructeur, l’une chez GM Sport (numéro 308) et l’autre, la mienne, chez GPA Racing, multiple vainqueur des championnats mono-type Peugeot, on ne pouvait pas mieux tomber. Notre 208, numéro 208, sera donc pilotée par 6 personnes : Kavinsky (le DJ au succès phénoménal), Mathieu César (photographe de stars), Kwamé Adjei (Planète GT), JB Dessort (Le Billet Auto), sans oublier notre pilote pro, Aurélien Comte, pilote de 308 TCR dans le championnat du monde TCR International Series, rien que ça.
Après une rapide prise de connaissance avec notre voiture, puis une vidéo issue d’une caméra embarquée afin de visualiser les trajectoires, nous embarquons chacun notre tour en passager d’Aurélien pour quelques tours. Cette 208 est définitivement une voiture de course, avec des vitesses de passage en courbe impressionnantes. Une fois les quelques tours en passager bouclés, vient le moment de m’installer dans le baquet de gauche. La position est assez classique, puisqu’assez similaire à celle d’une 208 « normale », bien que le baquet soit installé un peu plus bas.
Mais tout le reste est différent ! Il faut se contorsionner pour enjamber la partie basse de l’arceau, sans venir frapper la partie haute avec le casque et se laisser glisser dans le baquet. Contact, démarrage du moteur (le tout sur la console située derrière le levier de vitesse), le petit 4-cylindres ronronne sur son régime de ralenti. Première enclenchée, le mécanicien me fait signe de partir. Une petite goutte de sueur perle sur mon front, je suis seul au volant d’une voiture de course, lâché au milieu de la meute des essais libres.
Les premiers virages sont plutôt hésitants et prudents, afin de découvrir l’auto et prendre des repères sur la piste. L’arrière est vraiment mobile, ce qui est assez déroutant au départ. Sur les freinages appuyés (pas d’ABS mais une pédale assistée qu’il convient de manier avec délicatesse), on sent que la voiture se dandine, l’arrière semblant même parfois vouloir passer devant. Puis la confiance arrive, les temps commencent à devenir raisonnables grâce à plusieurs tours clairs, les virages passent de plus en plus fort, les freinages se font de plus en plus tard, un vrai plaisir ! Je me prends au jeu et me sens vraiment dans la peau d’un pilote. Fin de la première séance d’essai, je rends la voiture intacte (c’est déjà une victoire) et je suis plutôt satisfait de mes premiers pas.
Je laisse le volant à mes coéquipiers, qui prennent également leurs marques, puis nous nous rendons au déjeuner. Je quitte la table rapidement pour voir s’il est possible de reprendre le volant et profiter d’un maximum de temps de piste. Je m’élance donc une deuxième fois, avec les équipages de la catégorie Sprint, à savoir de véritables experts de la 208 Racing Cup, qui courent toute l’année et se battent dans des courses courtes et extrêmement disputées…
La pression monte encore d’un cran. Comme attendu, le niveau est encore plus relevé que lors de la première séance. Cela me permet toutefois de suivre (quelques instants) des pilotes plus rapides afin de comprendre leurs trajectoires et tenter d’imiter leurs points de freinage. A force de vouloir trop bien faire, les lois de la physique m’ont rappelé à l’ordre de façon quelque peu brutale. Une entrée optimiste dans la chicane du Nürburgring s’est soldée par un beau tête-à-queue. Fort heureusement, seules les roues arrière ont atteint le bac à gravier, me permettant de repartir sans devoir attendre la grue. Cela servira de leçon, à ne pas reproduire en course.
Une dernière séance d’essais me sera accordée avant les qualifications. Le feeling commence à venir mais les temps stagnent (a priori à cause de la température de la piste qui a augmenté au cours de la journée), autour de 2 minutes 19 secondes, à environ 3 secondes des meilleurs.
Après un briefing pilote où sont abordées les règles à respecter (drapeaux, vitesse dans les stands, procédures de safety car etc.), vient alors le temps des qualifications, en fin de soirée. Nous devons tous boucler au moins un tour chrono et notre place sur la grille de départ sera liée à la moyenne de nos temps individuels. Aurélien s’élance en premier et nous gratifie du 5ème temps du 49 voitures. Efficace ! Je suis le quatrième à me glisser dans le baquet, au moment du coucher de soleil. Le décor est superbe, le temps est vraiment avec nous ce week-end. Mes chronos sont encore un peu meilleurs qu’aux essais, notamment grâce au fait que j’ose désormais passer la « Grande Courbe » en bout de ligne droite des stands à fond de 5. Impressionnant au départ, mais finalement ça passe sans encombre à chaque fois.
Mes coéquipiers passent à leur tour, avec plus ou moins de succès. JB se retrouve notamment bloqué dans le trafic, puis passe la majeure partie de son relais sous drapeau jaune, l’empêchant d’effectuer un tour clair. Fin de la qualification à 23 heures, de nuit, nous nous dirigeons donc tous vers notre hôtel. A ce stade, nous n’avons pas encore l’indication de notre position sur la grille.
Lendemain matin, je consulte le site internet des Rencontres Peugeot Sport et constate que nous partirons 41ème, juste devant la numéro 308 de nos confrères. La matinée est plutôt tranquille, nous ne prenons pas le volant avant le départ, prévu à 15h00. J’en profite pour regarder les courses Sprint depuis les tribunes puis les parades de l’aventure Peugeot et les démonstrations d’accélération et de brûlage de gomme de la 208 WRX. Les Peugeot assurent le spectacle !
14h30, les voitures se placent sur la grille de départ. Nous rejoignons Aurélien, qui prendra le départ pour notre équipage (expérience oblige). Nous posons devant l’objectif du photographe et nous nous prenons pour des pilotes professionnels. La pression commente à monter doucement.
15h00, le départ est donné ! Nous nous plaçons en bout de ligne droite pour observer les premiers tours. Nous constatons qu’Aurélien commence une remontée fantastique. Parti 41ème, Aurélien remonte à la 8ème place avant de me céder le volant ! Me voici donc en piste et en course.
Je suis plutôt en confiance, les temps sont corrects (dans les 2:18) et j’arrive à gérer le trafic sans trop de difficultés. Le fait d’être dans une course de 24 heures assagit certainement les esprits, tout le monde a conscience que la voiture doit tenir la distance et garde donc une marge de sécurité. En revanche, la chaleur dans l’habitacle devient gênante malgré l’aération mécanique fournie par la prise d’air sur le toit. Évidemment, la climatisation ne fait pas partie de la dotation de série d’une 208 Racing Cup.
Je passe le témoin à Kwamé au bout de 45 minutes environ, heureux d’avoir gardé la voiture sur la piste et amélioré encore mes temps. Je ne reprendrai le volant qu’à 20h. Je suis la course depuis le box et assiste, impuissant, à plusieurs erreurs (bacs à gravier, pénalité) qui nous relaient en fond de classement. Il va falloir se remettre à flots rapidement !
Mon deuxième relais, de 20h00 à 21h00 environ, se déroule sans encombre malgré un volant tremblant lorsque la voiture est en appui, probablement dû à une déformation des pneus. Seconde fois pour moi au coucher du soleil, le moment est toujours aussi magique.
Je profite du répit pour dormir quelques instants à la loge, afin d’anticiper la fatigue de la nuit. Par la suite, nous revoyons le planning entre nous et décidons de rallonger les relais à 1 heure, afin de nous arrêter moins souvent et de rester compétitifs. Je reprends le volant à 2h00 du matin, pour la première fois de nuit. J’appréhende cette situation, mais il se trouve que la piste est relativement bien éclairée et, la fraîcheur de la nuit aidant, plutôt adhérente. Ces deux facteurs permettent de conserver un rythme équivalent à celui de la journée, ce qui me rassure rapidement. J’effectue même quelques dépassements bien sentis (au freinage à Adélaïde ou dans le 180, ou même dans la grande ligne droite en sortant plus fort que mes concurrents à Estoril).
Au retour aux stands, l’ambiance est typique de ces courses d’endurance. Certains mécanos et pilotes dorment dans le box, d’autres se réveillent en sursaut lorsqu’un Safety Car est annoncé et que les pilotes en profitent pour ravitailler. Toute une atmosphère !
Second repos à la loge, un peu plus long cette fois, malgré une installation « système D » consistant en un alignement de 3 poufs formant (plus ou moins) un lit. A mon réveil, je me dirige vers le box et découvre qu’Aurélien vient de battre le record du tour, en 2:13:348 ! Son relais nous a permis de grappiller quelques places, mais nous naviguons toujours autour de la 40ème, tout comme la 308 de nos confrères.
A 6h00, je suis prêt à prendre le volant. Il fait encore nuit, mais on sent le soleil qui commence à pointer son nez à l’horizon. Au bout de quelques tours, ce dernier fait son apparition. Le spectacle est magique ! Après avoir eu la chance de rouler au coucher du soleil, j’ai l’honneur de vivre son lever ! Le relais se déroule à nouveau parfaitement, dans mes temps habituels (bien loin du temps canon d’Aurélien, mais à chacun son métier!). Je me fais cependant surprendre à Adélaïde. En voulant retarder le freinage au maximum, je me retrouve un peu court et passe l’épingle en vrac, à plusieurs mètres du point de corde et en contre-braquage… Plus de peur que de mal, je ne perdrai que quelques secondes dans la manœuvre.
A mon retour vers 7h00, je décide d’aller me reposer plus confortablement à l’hôtel, étant donné que mon prochain relais ne se fera qu’à 14 heures. Ce qui signifie également que j’aurai la chance, si tout se passe bien et après avoir vécu le coucher et le lever du soleil, de franchir la ligne d’arrivée au volant ! A ce stade, je ne regarde même plus le classement. Je prends mes relais les uns après les autres, fais de mon mieux pour ne pas faire d’erreur puis passe le volant au suivant. Exit la pression du résultat et des temps canons, maintenant il s’agit principalement de rallier l’arrivée.
Lorsque je reviens, je constate toutefois que nous sommes remontés à une belle 33ème place ! Aurélien a fait le job, d’autres concurrents (notamment la 308) ont connu des soucis mécaniques, nous sommes opportunistes et cela nous réussit.
Je m’équipe pour prendre mon relais. La chaleur du mois de juillet se fait ressentir, on me conseille donc de mouiller la cagoule et mes cheveux, ce que je m’empresse de faire. Ravitaillement, changement de pilote, me voici en piste pour le tout dernier relais de ces 24 Heures de Magny-Cours ! Je parviens à orienter les aérateurs dès la première ligne droite afin d’éviter de souffrir de la chaleur. Je roule le plus proprement possible, je dépasse lorsque je suis certain que le concurrent devant m’a bien vu, je me laisse doubler avec une grosse marge. En bref, je ne prends aucun risque, nous devons rallier l’arrivée coûte que coûte. Je rattrape tout de même la 308 et la dépasse, ce qui nous permettra de finir la course à proximité.
Au bout de quelques minutes, notre ingénieur de piste me prévient que le 34ème nous remonte peu à peu. Il reste un peu de marge, mais il me demande de ne rien lâcher. Je conserve un rythme élevé (tout est relatif, je suis tout de même à 3 ou 4 secondes du record du tour d’Aurélien) afin de ne rien concéder à nos adversaires. Je passe la ligne d’arrivée au bout de 24 heures, on m’annonce la fin de course dans la radio, mais je ne vois pas le drapeau à damiers ! Je ralentis mais constate rapidement que les autres concurrents ont gardé le même rythme… Il se trouve que le leader était encore derrière moi et qu’il reste encore un tour ! Fort heureusement, personne n’a profité de la confusion pour me doubler, je fais donc mon dernier tour le plus rapidement possible et passe, enfin, le drapeau à damiers !
On me félicite à la radio, je remercie William, notre ingénieur de piste. Je ralentis pour laisser la 308 remonter à mes côtés, nous paradons côte à côte et saluons les commissaires de piste dans notre tour de décélération. Direction le parc fermé, nous abandonnons nos montures et nous dirigeons vers nos boxes respectifs afin de serrer les mains des coéquipiers, des mécanos et de tout le team. Nous l’avons fait ! 24 heures d’émotions, de sensations et de souvenirs à jamais gravés. Nous sommes nombreux à avoir vécu notre toute première course de 24 heures, pour notre plus grand bonheur.
Nous assistons, en équipe, au podium (où notre team, GPA, a placé 2 équipages sur les 2 plus hautes marches!) puis faisons un dernier passage dans les différents stands pour saluer tout le monde. L’adrénaline redescend doucement, nous réalisons le petit exploit que nous venons de réaliser. Nous terminons donc la course à la 33ème place du 49, un résultat plus qu’honorable étant donnée la faible expérience que nous avions en course automobile. Nos confrères de la 308 terminent 38ème, à cause d’un souci de biellette qui les a cloués aux stands pendant près d’une demi-heure.
Après avoir remercié tous les gens responsables des Rencontres Peugeot Sport, chacun reprend sa route. Sur le chemin du retour, les images des trois derniers jours défilent dans ma tête. Je commence seulement à réaliser la chance incroyable que représente cette course pour un grand nombre de pilotes amateurs et non fortunés et a fortiori la chance qui s’est offerte à moi. Les courses de 24 heures ne sont finalement pas si nombreuses en sport automobile et celle-ci est de loin la plus accessible, que ce soit en terme de budget ou de niveau de pilotage requis.
Si vous cherchez comment occuper vos week-ends avec des courses disputées, passionnantes et au budget raisonnable, les Rencontres Peugeot Sport sont faites pour vous. Pensez-y !
Texte : Alexandre Besançon
Photos : Peugeot